Neutralité carbone, de quoi parle-t-on ?
Vous avez sûrement entendu parler de la neutralité carbone. Si ce n'est pas le cas, il s'agit d'un des objectifs pris lors de l'Accord de Paris sur le climat en 2015. Avec comme second objectif la réduction de l'empreinte carbone, cet accord cherche à limiter la température sous les 1,5°C de réchauffement, et ce d'ici à 2050.
Mais, de quoi parle-t-on concrètement quand on évoque la neutralité carbone ?
État des lieux
Le carbone est présent naturellement dans l'atmosphère. Cependant, les activités humaines rejettent une quantité telle que le réchauffement climatique ne cesse de s'emballer.
Pour se faire une idée plus précise : les réservoirs naturels (sol, océans, forêts) éliminent 9,5 à 11 gigatonnes de CO2 par an tandis que les émissions mondiales grimpent à 37,1 gigatonnes en 2017.
Définition de la neutralité carbone
Si l'on prend la définition donnée par le Parlement Européen, la neutralité carbone désigne "l'équilibre entre les émissions de carbone et l'absorption du carbone de l'atmosphère par les puits de carbone".
On ne parle donc pas d'atteindre les zéro émission CO2 mais bien d'un équilibre. Ce terme met l'accent sur deux façons d'atteindre la neutralité carbone :
- Réduire l'empreinte carbone grâce à des leviers d'action à tous niveaux et tous secteurs confondus ;
- Compenser les émissions grâce à des systèmes capables d'absorber le CO2.
Évoqués précédemment, les puits de gaz à effets de serre naturels, comme les forêts ou les océans, sont des systèmes de compensation. Mais ils ne suffisent pas. Les puits artificiels, le financement de projets comme la plantation d'une forêt ou des projets d'énergies renouvelables sont aussi des techniques de compensation.
Les limites de la neutralité carbone
Confrontation des deux stratégies
Le neutralité carbone met en avant deux stratégies : la réduction et la compensation. Il est donc possible d'atteindre la neutralité carbone uniquement par la compensation. Un acteur peut continuer à émettre des émissions de gaz à effets de serre, et donc polluer, mais en payant pour compenser.
Il faudrait pourtant miser sur la réduction pour une action rapide. En effet, si l'on prend l'exemple de la plantation d'une forêt, l'acteur qui finance continuera à émettre des GES tandis que la forêt met plusieurs années à pousser et par conséquent à être en capacité d'absorber ces émissions.
Communiquer sur la neutralité carbone
Conformément à la loi Climat & Résilience, depuis le 1er janvier 2023, il est interdit d’affirmer dans une publicité qu’un produit ou un service est neutre en carbone.
Il existe quelques exceptions à cette interdiction. Pour le mentionner, l'annonceur doit rendre aisément disponible au public :- Un bilan d’émissions de GES intégrant les émissions directes et indirects,
- Une trajectoire de réduction des émissions de GES,
- Les modalités de compensation des émissions de GES résiduelles.
Mentionner la neutralité carbone est un argument trompeur, pouvant freiner les changements de comportements et provoquer des effets rebonds négatifs auprès des consommateurs.
Et les autres gaz à effets de serre ?
Dans sa définition, le Parlement Européen ne prend en compte que le CO2. Même s'il représente 75% des gaz à effets de serre mondiaux d'origine humaine, il faudrait pouvoir ajouter le méthane à l'équation qui englobe 20% des GES.
Émissions directes, indirectes et élargies
Quand on parle de neutralité carbone, il faut être capable de calculer ses émissions de CO2. Mais le résultat peut être très différent en fonction du périmètre choisi.
3 périmètres :
- Les émissions directes (scope 1) : les émissions de CO2 émises directement par l'individu par la consommation d'énergies fossiles.
- Les émissions indirectes (scope 2) : les émissions générées par la consommation électrique par exemple. La consommation n'émet pas de CO2 directement mais sa production oui.
- Les émissions élargies (scope 3) : toutes les émissions liées à la consommation de l'individu : fabrication de son ordinateur, production de l'alimentation, ...
Selon l'étude "Taking stock : a global assessment of net zero targets", seulement 27% des 2000 plus grandes entreprises mondiales ayant pris un engagement de neutralité carbone ont basés leurs calculs sur le scope 3.
En savoir plus :
L'avis de l'ADEME sur la neutralité carbone : décryptage
Neutralité carbone : le grand n’importe quoi des allégations climatiques